Siba Sahabi
période de résidence juillet – octobre 2023
Entretien réalisé par Freek Wolter
Siba Sahabi (1979) est venue à Meudon en plein été, pour faire des recherches sur la danse et la musique. Une fois arrivée à la Maison Van Doesburg, elle ne tardait pas à développer de nouveaux projets. Elle me reçoit un samedi après-midi, pour le déjeuner. Dans l’atelier, nous parlons de ses travaux artistiques et ses expériences à Meudon. Siba réside dans la Maison Van Doesburg jusqu’à fin octobre.
Peux-tu me dire quelques mots sur ton œuvre ?
Je m’occupe surtout de la conception d’objets, d’installations et de décors pour le théâtre et les films. Puisque je suis d´origine germano-iranienne, le rapport entre l’Europe et l’Orient joue un rôle important dans mes travaux. Les histoires de notre passé montrent que plus d´échanges ont eu lieu que l´on ne croit souvent. Prenons la perspective linéaire. Elle a joué un rôle majeur dans la renaissance italienne, mais elle était en fait basée sur des savoirs provenant du Moyen-Orient. Il en va de même pour les motifs géométriques : si caractéristiques pour l’art oriental, on les retrouve également dans la Grèce antique. Nous avons tous les deux une fascination pour la géométrie, Theo van Doesburg et moi : il aimait les rectangles, moi je préfère les triangles.
Quels idées t’ont motivé de venir à la Maison Van Doesburg ?
Récemment, je m’intéresse de plus en plus à la danse. Je suis venue à la Maison Van Doesburg pour développer une façon de mettre par écrit cette pratique, comme on a fait avec la musique. Ecrire la musique est déjà assez complexe, puisqu’on doit composer avec la longueur, la hauteur et l’intensité des notes. Pour la danse, c’est l’espace, le temps et l’intensité des mouvements qui entrent en jeu. Je tente de capturer une telle « composition » dans une notation tridimensionnel, où des objets permettent au créateur de communiquer avec les danseurs. Je vais tester cette approche en coopération avec plusieurs artistes.
Quel rôle Theo van Doesburg joue-t-il pendant cette résidence ?
Pour Theo et Nelly, l’interdisciplinarité était tout à fait évidente. Ils ne liaient pas strictement la formation des artistes à leur pratique artistique. En tant que designer, je travaille avec différents disciplines et créateurs, tous avec leurs expériences à eux. Une fois il y a quelques semaines, j’ai rencontré Els Reuver pendant un pot à l’Atelier Néerlandais. Els est chorégraphe et dans l’espace de dix minutes on s’est dit, « d’accord, on va développer un projet ensemble ». Elle s’est ensuite tournée vers son réseau pour trouver deux de ses élèves, qui voulaient bien danser dans une performance : Emma Picard et Lorenzo Finocchi du Conservatoire Marcel Dupré à Meudon. En fait, toutes les personnes impliquées dans ce projet viennent de Meudon. Du photographe Jean-Michel Bale à la compositrice, Jennifer Hutt. Pour la performance, on s’est basée sur une citation de Theo van Doesburg. Selon lui, un paysage montagneux constitue le contexte idéal pour l’épanouissement de la pensée créative. La performance est une interaction entre les danseurs et trois sculptures : des montagnes abstraites.
As-tu une pièce préférée dans la maison ?
L’atelier. J’adore sa table, conçue par Theo. Assise là, on prend pleinement conscience de la belle lumière qui entre dans la pièce. Elle vient non seulement du côté nord, comme d’habitude dans les ateliers, mais de partout. Ainsi, en été, vers huit heures du matin, se dessinaient ici en ombres les arbres du jardin sur le sol et les murs.
La résidence de Siba a reçu le concours du fond de stimulation de neérlandais l’industrie créative
Photos: Jean-Michel Bale ©